BROSSARD – Kent Hughes et Jeff Gorton n’ont pas l’intention de déroger de leur plan. Le directeur général et le vice-président des opérations hockey désirent toujours construire pour le futur sans y aller de raccourcis pour un électro-choc à court terme.
Mais il y a un élément qui fait contraste quand on compare le bilan de cette fin de saison 2023-24 à celui offert au tournoi de golf de l’équipe. Le mot en P (playoffs en anglais) est maintenant envisagé.
« Premièrement, je ne crois pas que c’est un mot tabou, a dit Hughes quand on lui a reparlé des déclarations de Gorton avant la saison. Toutes les équipes dans l’Est veulent faire les séries. Il y a plusieurs bonnes équipes. En gestion, on doit avoir une vision plus à long terme que les joueurs. On veut améliorer notre équipe chaque été. S’il y a des moyens de le faire pour avancer nos objectifs, que ce soit avec des échanges ou par le marché des joueurs autonomes, on le fera. Mais on ne le fera pas à tout prix. On ne veut pas nuire à notre objectif à long terme. »
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Hughes et Gorton ont tous deux dit qu’ils aimeraient voir leur équipe se retrouver dans le « mix » la saison prochaine. Ils ont recyclé l’expression utilisée par Martin St-Louis lors de son propre bilan quelques minutes après le 82e match de la saison, un revers de 5-4 en tirs de barrage contre les Red Wings de Detroit, mardi, au Centre Bell.
« Honnêtement, je m’attends à ce que les joueurs se fixent un objectif en début de saison qu’ils feront les séries, a affirmé Hughes. C’est leur nature. Ils n’auraient jamais atteint les rangs professionnels sans un esprit compétitif. Dans l’Est, toutes les équipes auront le même objectif. Comment peut-on les aider? Ça commence aujourd’hui avec nos entrevues de sortie. On mettra l’accent sur certaines choses. Comment les joueurs prendront les choses en main, c’est leur équipe. »
Des munitions pour bouger
Hughes et Gorton ont analysé cette saison pendant près d’une heure, se retrouvant côte à côte au podium. Gorton, qui portait une oreillette pour recevoir la traduction du français à l’anglais, a lancé quelques blagues à Hughes pour détendre l’atmosphère.
« Cette conférence de presse représente mon plus grand défi », a dit Gorton lorsque questionné sur le principal enjeu de son équipe.
Gorton, qui a servi comme architecte chez les Rangers de New York jusqu’à son congédiement à la fin de la saison 2020-21, a l’expérience en matière de reconstruction. À Montréal depuis le départ de Marc Bergevin au mois de novembre 2021, l’Américain sait qu’il n’y a pas une seule recette pour replacer une équipe de la LNH sur les rails. À New York, il avait aussi profité de conditions favorables avec les acquisitions d’Artemi Panarin et d’Adam Fox, deux joueurs qui voulaient jouer à Manhattan.
Aux yeux de Gorton, le marché de Montréal n’a rien à envier à celui de la jungle new-yorkaise.
« Je crois que Montréal sera une place où les joueurs voudront jouer, a prédit Gorton. Et je sais que "Marty" (Martin St-Louis) aide à cette perception. Il y a aussi un bon groupe de joueurs ici. Nous avons des gars avec du caractère. Vous me parlez de New York, mais nous voulons maintenant savoir quelle sera la prochaine étape pour nous. Il y a de l’espoir. Le futur est prometteur. Nous l’avons vu à notre dernier match avec nos deux jeunes (Lane Hutson et Logan Mailloux). »
Gorton n’a toujours pas une baguette magique dans ses mains. Idem pour Hughes. Ils ne savent pas quand ils auront besoin d’appuyer sur l’accélérateur afin de bâtir une équipe plus compétitive.
« J’aimerais dire que tu le sais quand c’est le temps, a répliqué Gorton. Ça peut arriver avec une transaction ou un joueur autonome. Nous avons fait des trucs pour accélérer les étapes à New York. Nous avons plusieurs atouts et de bons joueurs. Nous voulons figurer ce que ça vaut. C’est difficile d’y répondre. Nous nous sentons bien, nous avons un plan. Nous ne voulons pas faire un truc à court terme. S’il y a un joueur autonome qui peut nous aider, nous allons le considérer. S’il y a une transaction que nous pouvons conclure, nous y penserons. Nous avons déjà bougé dans le passé pour améliorer l’équipe. »
Hughes a donné des indices sur les pièces qu’il voudrait ajouter à son casse-tête.
« On croit que nous avons besoin d’ajouter du talent offensif, a mentionné le DG. Je crois qu’on doit améliorer le côté physique de notre équipe aussi. Est-ce que nous y arriverons en ajoutant des joueurs? Ou en demandant plus à des joueurs que nous avons? Il y a aussi des aspects de notre jeu que nous devons améliorer, comme notre travail sur les unités spéciales. Encore là, cette amélioration viendra-t-elle avec l’ajout de joueurs ou par des ajustements? »
Sur papier, le CH mise sur un bon premier trio avec Nick Suzuki, Cole Caufield et Juraj Slafkovsky. Un retour en santé la saison prochaine de Kirby Dach offrira à St-Louis un deuxième centre digne de ce nom. Mais le genou de Dach devra tenir et la malchance devra s’éloigner de cet ancien troisième choix au total des Blackhawks de Chicago.
Alex Newhook, une autre acquisition en marge du repêchage, a aussi le potentiel pour patiner au sein de l’un des deux premiers trios. Mais après ça, c’est assez mince.
Hughes et Gorton le reconnaissent. Ils auront besoin d’ajouter des ressources à l’attaque. S’ils veulent y parvenir, ils disposeront de bonnes munitions avec douze choix au repêchage en 2024 et douze autres choix en 2025. Parmi cette grosse banque, il y a quatre choix de premier tour, trois de deuxième tour et cinq de troisième tour.
À la ligne bleue, le CH a un surplus d’espoirs avec David Reinbacher, Lane Hutson, Logan Mailloux et Adam Engstrom. Kaiden Guhle, Arber Xhekaj, Jordan Harris, Justin Barron et Jayden Struble restent aussi de jeunes loups.
Il ne faut pas être un génie pour prédire le départ d’un ou deux jeunes défenseurs afin de garnir les coffres à l’attaque. À ce sujet, Hughes a opté logiquement pour la prudence.
« Il est trop tôt pour identifier qui pourrait partir, mais j’ai reçu des appels de certains agents, a dit l’ancien agent de joueurs. Ma réponse pour les agents était qu’à un certain point on tenterait de faire des échanges. Il n’y a aucune décision de prise pour savoir qui pourrait partir. Aucun défenseur ne peut rentrer cet été avec l’attente qu’il peut être échangé. »
Hughes a assez d’expérience pour reconnaître qu’il jouera gros dans les prochains mois.
« Oui, il s’agira de l’été le plus important. Mais l’été prochain sera encore plus important. »